Reflex [Maud MAYERAS] ou comment s'ennuyer pendant 250 pages pour finalement ne plus pouvoir lâcher le bouquin



Cela faisait un moment que Reflex occupait sa petite place dans ma bibliothèque. Je l'ai dégoté dans une bourse aux livres (à 1€, état neuf, gnak gnak gnak) il y a plusieurs mois et entre temps, beaucoup d'autres polars lui sont passés dessus (au sens figuré bien entendu, je veux dire par là que j'ai préféré lire d'autres bouquins achetés de surcroît plus récemment; il n'y a aucun coït de livres dans ma bibliothèque).
C'est donc assez machinalement que j'ai entamé cette lecture en début de semaine...


Iris est une jeune femme écorchée vive (au sens figuré toujours, ce sont les victimes du tueur qui le seront au sens propre), photographe pour la police et bègue. Son truc, c'est prendre des clichés de victimes pour oublier que son propre fils Swan, 6 ans, a été assassiné 11 ans plus tôt. Et puis un jour, son collègue lui téléphone pour un travail dans sa ville natale, celle-là même où Swan a été tué. Elle y restera coincée un moment car sa moto va tomber en panne... Et forcément, les vieux démons vont ressurgir, puisqu'un tueur semble sévir et répéter le même schéma qu'il y a 11 ans.
Perdre un enfant est une maladie que l’on a peur de contracter. C’est une contagion dont on évite soigneusement les infectés. On change de trottoir, on les fuit à toutes jambes.
De ces gens-là, je suis la peste et le choléra. Je suis leur faucheuse, leur cancer, leur 22 long rifle.
Que ce livre est éprouvant ! Ce sont les premiers mots qui me viennent au bout des doigts. Mais attention, dans tous les sens du terme. Je ne compte pas les fois où j'ai soupiré/grogné/marmonné pendant les 200 premières pages. MAIS CA COMMENCE QUAND NOM D'UNE PIPE EN BOIS? C'est quand, là, que le THRILLER il démarre? C'est QUAND qu'on en vient AUX FAITS?
Vous l'aurez compris, chers 6 ou 7 lecteurs, on s'ennuie, et je reste polie. J'aurai pu écrire qu'on s'emmerde mais... ce n'est pas jojo (gloups). 

Toute la première partie n'est qu'allées et venues entre "la maison de la maman d'Iris" et la "maison de retraite de la maman d'Iris". Et on ne fait quasiment que ça de chapitres en chapitres. Elles semblent se détester viscéralement et, même si la question est "pourquoi?", c'est vraiment peu intéressant à lire car très répétitif. Le rythme est très, très lent; on ne comprend pas trop où l'on va. Le résumé de la quatrième de couv' semble n'être qu'un lointain souvenir.
Iris retrouve également de vieilles connaissances, mais... cela la plupart n'apporte strictement rien au récit.
En plus, l'héroïne à un PUR job: elle photographie les scènes de crime. Ca promet du glauque et du sang non? Que nenni, pauvres fous, son travail est à peine exploité. C'est fort dommage, car l'idée de base était on ne peut plus originale!
En outre (j'ai réussi à le caser celui-là), le personnage d'Iris n'est pas du tout attachant. Elle a beau être bègue et avoir perdu son gosse, avoir été rejetée par sa mère et être orpheline de père, on n'arrive même pas à éprouver de l'empathie pour elle. Je ne sais pas; je l'ai trouvé détestable. La pauvre, elle n'a décidément pas grand chose pour elle.
J'ai donc failli abandonner ma lecture un nombre incalculable de fois. 
Je crois que ma mère a souhaité que je la déteste chaque jour un peu plus. Elle a attisé cette rancœur en ne m'offrant que le silence. Elle m'a haïe plus encore parce que sous mes traits, c'est son visage, ses joues qu'elle voulait frapper.
Heureusement, le roman est partagé en deux points de vue qui s'alternent. Celui d'Iris, bien sûr. Mais aussi le point de vue omniscient de la narratrice qui relate une lignée de femmes, qui nous conduira à la naissance puis aux origines du tueur, des années 1920 (vie de la grand-mère, oui, elle remonte loin) jusqu'à nos jours. Et ça, c'est très bon à lire. Le changement d'époque est dépaysant et surtout, plus on approche de la fin, plus la tension monte, forcément... C'est efficace, c'est diabolique. 

Donc, d'un coup, sans crier gare, l'auteure semble réagir. Et tout le suspense, toute la violence, bref tout le thriller qu'elle a presque oublié d'écrire pendant 200 pages, tout cela sort sur la deuxième partie (voire même seulement le dernier tiers) et alors là, accrochez vos ceintures, parce qu'honnêtement, j'ai rarement été prise comme ça par un bouquin (non non, toujours aucun coît avec un livre, c'est toujours du sens figuré, bande de coquinous).

 
C'est simple, j'ai mis 4 jours à lire la première partie et 4h à lire la deuxième. CQFD. Je sentais le dénouement et le rapprochement pointer le bout de leurs nez, au fur et à mesure que les deux époques se rejoignaient temporellement... et impossible de poser le bouquin (A taaaaable!!!)
Belleville est l'unique centre agréé destiné à accueillir les publics inadaptés : les séniles, les psychotiques, les amnésiques, les suicidaires, ceux dont on ne veut plus. Ceux qui ne parviennent ni à vivre ni à mourir.
Tout s'accélère, les révélations sont totalement imprévisibles (moi qui aie l'habitude des polars et de pester quand je découvre la fin avant la fin, j'ai été servie). Les rebondissements vont crescendo et j'ai poussé des "haaannnn" de surprise à tout va, car l'auteure sait nous envoyer sur de fausses pistes, nous surprendre totalement. Sa maîtrise du genre ne fait aucun doute. Le bouquin devient presque soudainement un véritable page turner. C'est même à se demander si cette fourbe de Maud Mayeras n'a pas voulu nous endormir sur les 200 premières pages exprès... Car il y a bien des indices disséminés, on s'en rend compte après coup.

Donc Reflex me laisse perplexe. Vraiment. On passe du petit manège planplan aux montagnes russes. A la question ce livre vaut-il le coup d'être lu... j'ai tout de même envie de répondre un grand OUIIII. 
Et Dieu sait que lorsque je m'ennuie, je deviens très dure, très exigeante, voire pas sympa. La fin est tellement renversante que j'en ai oublié ma douleur des débuts.
La plupart des présents n'avaient jamais vu de macchabée de leur chienne de vie. Ou juste dans les films, quand la pellicule les leur a montrés sous leurs plus beaux atours, la peau blanche, les yeux clos, le sang encore rouge. La mort n'a rien à voir, elle donne aux corps des couleurs insensées, elle ne ferme jamais tout à fait les yeux de ses victimes, et le sang rouge n'est que noir et collant. La mort donne dans le détail, elle ne cherche pas à faire beau, elle fige l'homme dans toute sa plus ridicule simplicité.
Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler Spoiler (On ne peut pas dire que je ne vous aie pas prévenus petits chenapans)
 
 Si vous avez lu le livre/ Que vous ne comptez pas le lire / Que vous vous fichez d'être spoilé:
J'ai donc percuté, en refermant le livre, qu'absolument tout tournait autour de la Mère. La mère de Lucie. Lucie, la mère d'Henri. Diane, la mère d'Iris. Iris, la mère de Swan. Toutes les déviances des uns et des autres ne sont liées qu'à une mère dysfonctionnelle par le passé. Et le rebondissement final, qu'on comprend au travers des récits de Diane, c'est qu'Iris elle-même était une mère défaillante. L'indice, c'était bien évidemment les bleus sur le corps de Swan, que Henri/Jackie avait repérés par le passé et qui l'ont poussé à enlever le garçon, pour l'arracher à sa mère.

On comprend mieux pourquoi Iris, personnage principal tout de même, est aussi détestable. Aucune identification possible pour ma part. Par exemple, quasiment tous les débuts de chapitre commencent par un "je n'aime pas" (je les sautais; shame on me). Et bien quand on réalise qui Iris était vraiment, on se dit que finalement, c'était p'têt bien normal de pas pouvoir la sentir pendant tout le roman. 


Pour conclure, un thriller bien noir, (vraiment trop) long à démarrer mais juste impossible à lâcher par la suite. Oui, je sais, ça promet de longues tergiversations pour décider si oui ou non il faut le lire. Vous êtes prévenus! :)
Dans tous les cas, une auteure (méconnue jusqu'ici) à suivre pour moi!

Mes p'tites étoiles
 



Commentaires

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...